Non, la vidéo à la demande ne tue pas la consommation de télévision traditionnelle !
C’est la principale conclusion à laquelle aboutit l’institut Nielsen Media Search qui vient de mener aux Etats-Unis la première étude d’usages comparés entre vidéo non-linéaire (VOD) et vidéo linéaire (télévision). Cette étude a été conduite de juin à août 2005 sur un panel de 180 abonnés au câble numérique de l’opérateur Comcast à Philadelphie. Contrairement aux opérateurs français comme Noos UPC et Numéricable, les câblos américains proposent à leurs abonnés des décodeurs numériques avec voie de retour par le câble permettant de consommer avec sa télécommande de la vidéo à la demande sur son téléviseur, soit l’équivalent des services proposés par CanalPlay sur Freebox ou MaLigneTV de France Telecom via la ligne téléphonique en ADSL.
Dans le cas présent, Nielsen a recoupé les données d’audience TV classiques, qu’il collecte à l’aide de son dispositif « Local People Meter », avec les données de consommation de VoD de chacun des foyers panélistes sur le service du câble « Comcast On Demand ».
Les résultats publiés par Nielsen mettent en évidence que 75% des foyers ayant accès au service de VoD de Comcast l’ont utilisé au moins une minute durant les 3 mois, avec une durée moyenne de consommation de 69 minutes par jour.
Il en ressort surtout que les foyers utilisateurs de VoD sont de gros consommateurs de télévision traditionnelle avec 723 minutes par jour. Ce qui signifie que le téléviseur est chez eux allumé plus de 12 heures par jour !
Leur consommation globale de TV est supérieure de 9% à la durée moyenne des foyers câblés numériques et de 38% sur la moyenne de l’ensemble des foyers câblés (analogiques compris).
- Premier enseignement de cette étude, donc : la consommation de services non-linéaires ne réduit pas la consommation de TV traditionnelle. Une bonne nouvelle pour les éditeurs de chaînes.
- Deuxième enseignement : les enfants et les jeunes adultes sont sur-consommateurs de VoD.
Comme le montre le tableau ci-dessous, les téléspectateurs de 2 à 11 ans (en jaune) représentent 9% de la consommation TV classique, mais 19% de la durée sur la vidéo à la demande.
L’explication tient au large catalogue de dessins animés et programmes pour enfants, comme ceux de PBS Kids, mis gracieusement à disposition sur Comcast On Demand. Quant à la tranche des 18 – 34 ans (en bleu), elle génère 37% des usages sur la VoD alors qu’elle ne représente que 20% de la consommation de télévision. A ce niveau, il serait intéressant de connaître en détail les contenus VoD que consomme cette cible au détriment de la télé classique : séries, cinéma, sport, information… ? Ces données n’ont pas été diffusées dans le communiqué de presse… Informations trop stratégiques !
C’est ce que l’on appelle le FOD pour Free On Demand. On retrouve principalement des programmes des chaînes thématiques, des contenus jeunesse et des vidéoclips musicaux. En revanche, si l’on regarde en durée de visionnage quels sont les programmes les plus consultés, ce sont les services de SVOD, pour Subscription Video On Demand (VOD sur abonnement), qui totalisent plus de 11 heures sur 3 mois. Les services de SVOD de Showtime, Starz et HBO (l’équivalent de Canal+ en France) sont le plus souvent des prolongements de l’antenne de ces chaînes premium. Ils permettent en mode délinéarisé de (re)voir un film ou un épisode de série TV raté lors de sa diffusion à l’antenne. Chez Comcast, les abonnés numériques ont accès sans surcoût à ces services de « catch-up TV », le câblo ayant négocié des packages chaîne premium + VoD auprès des éditeurs de chaînes.
Pour le marché français, cette étude arrive à point nommé alors que les offres ADSL des fournisseurs d’accès Internet commencent à mélanger de la distribution de TV classique et de la vidéo à la demande. Pour les câblo-opérateurs comme UPC Noos, elle montre le chemin à suivre pour ne pas se laisser distancer par la concurrence. Les premiers décodeurs câble numérique avec voie de retour intégrée devraient faire leur apparition d’ici la fin de l’année. Avec la TVHD, la VoD sera l’un des marchés sur lequel en 2006 les opérateurs télécom, associés aux éditeurs de chaînes et aux détenteurs de droits audiovisuels, vont devoir rivaliser en matière d’innovation et de marketing pour séduire de nouveaux abonnés et les fidéliser.