L’enjeu est de taille et il est un signe qui ne trompe pas : tout l’état-major du groupe Canal+, le PDG Bertrand Méheut compris, était assis au premier rang de la conférence de presse ce lundi. Une conférence pour annoncer quoi ? Une fusion avec un câblo-opérateur ? Le rachat d’un fournisseur d’accès à Internet ? Un accord avec la Ligue de Football Professionnel ? Vous n’y êtes pas… Une conférence pour le lancement du nouveau site Web Canalplus.fr, en bêta jusqu’à la mi-septembre. Qu’on se le dise, Canal+ ce n’est pas qu’une chaîne payante pour amateurs de foot, de cinéma récent et de porno. A l’heure du Web 2.0, le groupe audiovisuel semble découvrir les vertus de l’Internet avec son modèle gratuit financé par la publicité.
Canalplus.fr, média ouvert à tous les internautes, a pour ambition de devenir un site de référence auprès des moins de 30 ans sur des thématiques emblématiques et identitaires de la chaîne éponyme, comme le sport, le cinéma, l’humour, les séries, l’information et la musique. Ce nouveau média interactif se veut généraliste, premium (comprenez haut de gamme et non pas payant), riche en contenus exclusifs et participatif. Hervé Simonin, Directeur des Nouveaux Contenus de Canal+, l’artisan de cette refonte du site, souhaite en faire le prolongement de l’antenne en déclinant « l’esprit Canal » selon trois types de contenus, le plus souvent vidéo.
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Une sélection de programmes phares de la chaîne, comme Les Guignols, Le SAV d’Omar et Fred, Groland ou encore Le Zapping seront mis en ligne en intégralité juste après leur diffusion télé.
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Des programmes exclusifs pour le Web, parfois inédits, comme les Pépites sur le Net, les Brèves de plateau, « I have a dream » la webradio de l’animateur Moustic, des bandes-annonces ciné en avant-première, les blogs des consultants foot de Canal.
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Des programmes produits par les internautes. Au travers de la rubrique CREA+, le site entend identifier les nouveaux talents. En cohérence avec la ligne éditoriale de Canal+, les meilleurs contributions vidéos seront rémunérées 50 euros par mois de mise en avant sur CanalPlus.fr. Les meilleurs des meilleurs passeront même sur l’antenne, à l’instar de l’émission Watcast sur TF1. Du « co-generated media », version Canal+.
Nous y reviendrons ci-dessous dans l’interview vidéo d’Hervé Simonin, ainsi que dans la présentation de Rodolphe Belmer, le Directeur Général délégué de Canal+. Globalement, la chaîne premium entre dans une véritable démarche de TV 2.0 en faisant participer les téléspectateurs, tout en prenant garde d’éditorialiser les contributions des amateurs afin de satisfaire aux exigences de qualité des internautes et des annonceurs.
L’objectif du site Web, en totale symbiose avec l’antenne de la chaîne, est de doubler son audience en un an (1, 6 millions de visiteurs uniques par mois, selon Nielsen NetRatings, actuellement) et d’accroître le temps passé par les internautes. Cette croissance devrait permettre à Canal+ Régie de monétiser l’unique format IAB de publicité, le medium rectangle 300x250 supportant la vidéo, présent dans les pages de niveaux 1 et 2. Roger Coste, le directeur de la régie interne, compte sur le faible encombrement publicitaire pour séduire les annonceurs et amener ainsi le site à l’équilibre financier dès la première année.
Pour rester dans l’esprit Web de Canal, je vous propose à présent deux « contenus vidéo premium et exclusifs » issus de cette conférence de presse ;-)
Tout d’abord, la présentation de Rodolphe Belmer sur les ambitions Web de la chaîne cryptée, à laquelle j’ai rajouté sa réponse aux questions des journalistes sur le modèle économique de Canalplus.fr. Quid du risque de cannibalisation des modèles payants du groupe de télévision à péage (abonnement, à la demande) ? Pour le fun, écoutez bien au milieu du discours du Directeur général son lapsus sur le « shit » de Canal. Cela mériterait presque un passage dans le Zapping !
Hervé Simonin, ancien dirigeant de LibertySurf, est arrivé il y a moins d’un an pour mettre en place la stratégie Web du groupe Canal+ sur les nouveaux contenus. Devant la caméra, il explique le parti pris éditorial qualitatif du site Canalplus.fr, le blogging, les chats avec les journalistes et consultants, le modèle de rémunération des internautes sélectionnés dans la rubrique Créa+ et celui des vidéos diffusées sur l’antenne de la chaîne.
En conclusion, il me semble que l’enjeu sous-jacent pour Canal+ est d’attirer la génération des « digitales natives », les 15 – 30 ans qui passent désormais autant de temps devant l’ordinateur que face au téléviseur, sur ce nouveau média. Les internautes d’aujourd’hui seront probablement les abonnés de demain, comme l’avoue Rodolphe Belmer. Derrière les communautés Web de la grande famille Canal+ se profilent des bases de prospects, si tant est que les profils et les comportements des utilisateurs soient étudiés, qualifiés puis exploités de manière ciblée. La révolution du CRM appliqué à la consommation des médias est sans doute en marche, une belle piste de réflexion pour la TV 3.0.
Et vous, que pensez-vous de cette nouvelle version du site Canalplus.fr ?