L’IPTV (Internet Protocol Television) est en train de bouleverser l’industrie audiovisuelle. Grâce au transport de la vidéo via les réseaux à large bande comme l’ADSL, le câble et la fibre optique, la distribution des programmes s’ouvre à deux nouvelles dimensions : l’interactivité, d’une part, et la personnalisation des contenus, de l’autre. S’il n’est pas certain que ce nouveau marché de la télévision enrichisse les éditeurs de chaînes comme de bouquets, pas plus que les opérateurs de réseaux et les services de VOD (vidéo à la demande), l’IPTV a au moins le mérite d’enrichir l’expérience utilisateur !
La conférence internationale TVoDSL 2007, associée au Triple Play Showcase, la semaine dernière à Paris, a permis aux professionnels du broadcast de faire le point sur les aspects technologiques et marketing de l’IPTV.
Pas d’annonces révolutionnaires. Les exposants, comme les orateurs à la tribune, ont souligné à quel point le protocole Internet appliqué à la vidéo représentait pour les opérateurs la fondation du multi plateforme (TV, PC, mobile).
Après le lancement d’offres de TV par ADSL très poussées sur l’ergonomie des services, à l’image de Club Internet avec Microsoft TV, le processus d’innovation n’est pas prêt de s’arrêter. Les opérateurs américains et européens préparent le lancement de fonctionnalités qui vont encore accroître la délinéarisation des contenus. Comme l’a expliqué Jeff Binder, Directeur des Solutions On Demand chez Motorola, après le fameux « time-shifting » (pause pendant un programme en direct, notamment sur les PVR – décodeurs à disque dur), place à présent au « start over » (regarder depuis le début un programme déjà commencé, sans l’avoir enregistré), au « channel time-shifting » (retour en arrière dans une chaîne via l’accès broadband), et au « program time-shifting » (zapping à l’intérieur d’une grille de programmes, en avant ou en arrière, à partir de l’EPG – Electronic Program Guide). Bref, avec IPTV, vous n’aurez plus aucune raison de rater le 20H de PPDA ou la météo !
Pour Hans Van Stiphout, Directeur Marketing des Applications Grand Public de la Division Fixe d’Alcatel – Lucent, il y a de la place pour les opérateurs entre les broadcasteurs et YouTube ! Pour plus de détails, cliquez sur la photo de droite, issue de la présentation de Hans Van Stiphout. Selon lui, l’IPTV permet d’offrir aux consommateurs des contenus vidéo personnalisés comme des programmes communautaires, de niche ou locaux. Et de citer en exemple l’expérimentation de la télévision citoyenne Lommel.tv en Belgique sur la base de la technologie MyOwnTV d’Alcatel-Lucent.
De retour d’un voyage d’études aux Etats-Unis, Thomas Jacques, Directeur de la Stratégie et de l’Innovation Technologique de TF1, estime que l’IPTV va induire une fragmentation des audiences et une augmentation des usages non-linéaires. Il constate également qu’avec des offres triple-play à moins de 30 euros par mois, la distribution TV et l’accès haut-débit deviennent des commodités comme l’eau et l’électricité. La valeur se déplace donc en amont vers les contenus et en aval vers les services comme les set-top-box ou les baladeurs vidéo. Face à la montée des contenus autoproduits (UGC – User generated content), les grands médias audiovisuels doivent adapter les flux de production existants vers des coûts plus bas et des formats multimédia (web, mobile, podcast). Evoquant les grands networks américains comme NBC et CBS, qui investissent massivement le Net pour voir comment vont se structurer les business models des nouveaux médias, le dirigeant de TF1 reste confiant. Il ne craint pas la désintermédiation qui permet aux producteurs d’adresser directement les téléspectateurs.
Pour Thomas Jacques, il y aura toujours de la valeur pour l’éditeur de chaîne :
- dans le choix des contenus pour des audiences ciblées
- en organisant verticalement et horizontalement ses programmes pour créer des rendez-vous
- en agrégeant les contenus sous des marques fortes, gages de qualité pour les consommateurs
- en finançant en amont la création d’œuvres de fiction et de cinéma
Pour finir ce panorama de l’IPTV, il faut noter la position quasi iconoclaste, sinon visionnaire, de Toby Russell, le PDG du cabinet de conseil britannique 3Vision. Ce consultant de haut vol, qui accompagne les opérateurs européens sur des projets de VOD et de TV par ADSL, estime que le fameux « Content is king » (le contenu est roi) doit être banni et remplacé par « Customer is king » (le client est roi).
Il explique pourquoi dans cette interview vidéo en anglais, sur son stand, et donne quelques conseils aux opérateurs de bouquets IPTV.