Avec l’arrivée du 100 Mégas, le train de sénateur se transforme en TGV. Pour la première fois, la Haute Assemblée a accueilli, dans ses murs du Palais du Luxembourg, ce mardi, un colloque consacré au Très Haut Débit. Les organisateurs ont réuni un panel exceptionnel de spécialistes de la fibre optique. Des opérateurs comme Orange, Noos Numéricâble, Free Citéfibre, Neuf Cegetel, tous engagés dans leur propre « plan fibre ». L’ARCEP, le Sénat, les collectivités, les syndics d’immeubles, les équipementiers télécoms, les constructeurs de réseaux, les éditeurs de services comme DailyMotion et producteurs de contenu comme Sporever ont aussi eu voix au chapitre.
Que retenir des différentes tables rondes ?
D’abord, les réseaux très haut débit en fibre présentent deux avantages par rapport aux réseaux haut débit ADSL actuels : d’une part, la possibilité de cumuler en simultané au sein d‘un foyer des usages gourmands en bande passante (TVHD en multi-poste, visiophonie, jeux en réseau, téléphonie en VOIP, vidéo à la demande, blogging…) et, d’autre part, la symétrie des débits (envoi de fichiers volumineux à 100 Mb/s vers des serveurs distants pour développer ses photos numériques ou partager ses vidéos…).
En France, l’objectif fixé par le gouvernement est de 4 millions d’abonnés au FTTH (Fiber To The Home, fibre dans le foyer) en 2012, avec des milliards d’euros d’investissements prévu par les opérateurs triple-play pour bâtir ces nouveaux réseaux. Les expérimentations ont commencé, mais le chemin sera long avant un déploiement commercial de la fibre optique à grande échelle.
Outre le montant des investissements, les obstacles opérationnels sont identifiés par les acteurs en présence et l’ARCEP, l’autorité en charge de la régulation des télécoms :
- Travaux de génie civil et bataille autour des conditions d’accès aux fourreaux existants dans les villes
- Fourniture de boucle locale optique passive par les collectivités
- Hétérogénéité des technologies d’accès : Ethernet, PON…
- Négociations avec les bailleurs et syndics pour accéder aux immeubles
- Nécessité de mutualiser les câblages internes aux immeubles (dégroupage optique)
- Multiplicité des technologies de transport du très haut débit dans le foyer : Ethernet, CPL (courant porteur en ligne), Wi-Fi…
- Mise en place de services collectifs en triple-play
- Propriété et entretien du réseau passif dans l’immeuble
… La liste est non exhaustive.
Alors, plutôt que de se faire des noeuds (optiques) au cerveau, voici un témoignage revigorant. Celui de Kees Rovers, fondateur et président de « Close the Gap », qui a déployé et exploite à présent un réseau optique sur un modèle totalement coopératif. Ce sont les habitants de la petite commune néerlandaise de Nuenen, près d’Eindhoven, qui en sont les propriétaires… et les clients. Plus de 80% de la population est abonnée à la fibre. Il a fallu 5 mois pour câbler la commune. A raison de 2.000 euros par maison, le coût global du réseau est de 15 millions d’euros. Mais le plus intéressant est ailleurs que dans le raisonnement économique. Kees Rovers explique que les services locaux déployés sur le réseau ont été massivement adoptés par les personnes âgées. La collectivité de Nuenen dispose de sa propre chaîne de TV communautaire en IPTV, qui retransmet spectacles culturels et sportifs. Le curé de Nuenen diffuse quant à lui la messe en vidéo depuis son église câblée. D’autres services comme la télé-surveillance, la télé-médécine et la visio-conférence rencontrent un grand succès auprès des seniors sans ordinateur. Un expérience collective de proximité qui, selon son initiateur, plaide en faveur du déploiement de la fibre optique dans les campagnes.
Autre témoignage décalé, celui de Serge Soudoplatoff. Ce Polytechnicien, chercheur en informatique, ex-France Télécom, entrepreneur, pense que les usages du Web 2.0 vont générer de nouveaux besoins en très haut débit. En particulier sur le débit montant, l’upload, qui permet aux internautes de s’exprimer.
Avec son accord, voici un extrait vidéo de l’intervention de Serge Soudoplatoff, assis aux côtés de Benjamin Bejbaum, PDG de DailyMotion (je vous renvoie à son interview vidéo sur place dans ma note "DailyMotion : en route vers la HD ?"). Il insiste sur le fait que la TVHD n’est pas la « killer application » du très haut débit et revient sur les évolutions technologiques, le rôle des opérateurs de réseaux, leur modèle économique. Plus amusant, il a une idée de ce que devraient faire les agents de France Telecom pour accélérer le déploiement de la fibre.