L'histoire retiendra peut-être que "Le secret de Brokeback Mountain" est le premier film hollywoodien à être mis en vente simultanément sur Internet et en DVD. L'initiative en revient aux majors du cinéma américain qui détiennent le site de vidéo à la demande Movielink.
En raccourcissant le délai de mise en vente en téléchargement de ce film - récipiendaire il y a un mois de trois Oscars dont celui du meilleur réalisateur pour Ang Lee - Movielink ne cherche pas seulement à faire un coup en matière de communication. Il s'agit avant tout de lutter contre le piratage numérique en offrant une alternative payante sur Internet pour les fans de ce blockbuster.
Je reviendrai dans quelques jours sur cette annonce pour détailler l'activité de Movielink. Il se trouve que c'est l'une des entreprises que nous venons de visiter à Los Angeles à l'occasion du voyage d'études du séminaire de l'Institut Multi-Médias. Et j'ai pu interviewer en vidéo son PDG Jim Ramo. Il explique sa vision du marché de la VoD et les facteurs clés de succès pour ce type de service.
En attendant, je me permets de citer intégralement la dépêche de l'Agence France-Presse par laquelle j'ai eu connaissance de l'information.
La sortie conjointe en DVD et sur internet, arme anti-pirates d'Hollywood (AFP)
Les grands studios d'Hollywood permettent depuis le début de la semaine aux spectateurs d'acheter des films en téléchargement sur internet dès le jour de leur sortie en DVD, espérant ainsi "convertir les pirates en clients légaux".
De puissantes entreprises de la capitale du cinéma comme la Paramount, Universal, Sony, Metro-Goldwyn-Mayer (MGM), Warner Bros et 20th Century Fox vendent déjà quelque 200 films via la société Movielink qu'ils détiennent en commun, créée en 2002.
Mais la romance homosexuelle entre deux cow-boys "Le secret de Brokeback Mountain", produite par une filiale d'Universal, devait être mardi le premier film hollywoodien à être proposé sur Movielink parallèlement à sa sortie en DVD.
D'autres films comme le "remake" de "King Kong", le thriller politique sur le maccarthysme de George Clooney "Good Night, and Good Luck", la biographie du chanteur Johnny Cash "Walk the Line" et "Harry Potter et la coupe de feu", suivront d'ici peu.
Dans le même temps, le principal concurrent de Movielink, Cinemanow, a commencé à autoriser le téléchargement de films de Sony et du studio indépendant Lion's Gate, à qui l'on doit notamment "Collision", Oscar 2006 du meilleur film.
Depuis lundi, les clients de Movielink peuvent créer leur propre bibliothèque de films numériques, visibles sur jusqu'à trois ordinateurs, et ont aussi la possibilité de télécharger des films en location pour 24 heures.
"Nous sommes engagés à développer Movielink pour que nos clients obtiennent le meilleur service possible, davantage de possibilités technologiques, une sélection plus importante et une disponibilité des titres... plus tôt", a indiqué l'entreprise dans un communiqué.
Par cette méthode, Hollywood tente aussi de faire diminuer le piratage des films par internet.
"Les studios considèrent que l'internet est une plateforme de distribution viable pour leurs films, et offrir ce service permettra aussi de convertir des pirates sur internet en clients légaux", a affirmé son PDG, Jim Ramo.
Selon l'association du cinéma américain (MPAA), qui défend les intérêts des grands studios de Hollywood, le piratage a coûté quelque 3,5 milliards de dollars au secteur du cinéma en 2004 et environ 5,4 milliards en 2005.
Mais un spécialiste du secteur, Jay Cooper, a affirmé que la possibilité de se procurer des DVD et des téléchargements constituait moins un antidote au piratage qu'une nouvelle source de revenus pour les studios d'Hollywood, alors que les recettes en salles ont baissé de quelque 5% en 2005.
"Je pense que c'est une avancée importante dans la distribution des films", a ajouté M. Cooper, avocat chez Greenberg Traurig. "Le box-office est en baisse, les ventes de DVD sont en baisse et les grands studios exploitent la possibilité de nouvelles sources de revenus".
Le site internet de Movielink est séparé en deux "magasins", l'un pour la location et l'autre pour un achat permettant un accès illimité à une oeuvre pour environ 20 dollars. Le film peut être téléchargé un nombre limité de fois sur un disque dur ou gravé sur un support comme un DVD ou un CD vierge.
"Je ne sais pas si les studios réaliseront de gros chiffres sur cette opération, car il faudra environ 90 minutes pour télécharger un film (...) mais c'est un bon début", a concédé M. Cooper, affirmant que "la vidéo à la demande et les films à télécharger feront partie de notre avenir".
Source : AFP